Le grand vide c’est LE roman graphique le plus atypique que j’ai lu cette année ! Scénarisé et dessiné par Léa Murawiec et publié aux éditions 2024 ce titre, en oscillant entre présence et vide, nous plonge dans une fresque vertigineuse dont on ne ressort pas indemne. Pas mal médiatisé ces derniers temps, Le grand vide montre tout le talent de Léa Murawiec dans une fable dystopique.

Résumé :
Manel Naher vit dans une immense mégalopole où la seule condition à la survie est d’être suffisamment « présent » dans l’esprit des gens. Temps que l’on pense à vous, vous vivez et si ce n’est pas une mais des milliers de personnes qui vous suivent, alors vous êtes immortel. Mais voilà Manel Naher n’a que deux amis, une micro-famille et ne veut pas de cette « présence ». Elle ce qu’elle désire par-dessus tout c’est d’aller visiter le grand vide qui délimite la cité. Alors quand une crise cardiaque vient chambouler ses plans, c’est sa vie entière qui se voit modifiée et dans son sillage, celle des gens qui l’entourent.
Chronique :
Trois couleurs caractérisent ce récit. Le rouge, le bleu et le blanc, ce qui donne une identité graphique extrêmement forte au récit. Pouvant paraitre simple de prime abord, on découvre rapidement la complexité du trait de Léa Murawiec qui ne laisse pas un centimètre au vide. Car oui le grand vide est particulièrement rempli à l’image d’une cité tentaculaire faite d’un empilement d’immeubles tous plus géants les uns que les autres, au point où le ciel n’existe tout simplement plus. Un dessin qu’on pourra finalement rapprocher de celui de certains designers industriels ou d’architectes. On notera certaines doubles pages tout simplement vertigineuses qui à elles seules mériteraient un tirage à part en grand format !
Le scénario m’a rapidement donné le vertige (sentiment exacerbé par le dessin riche en perspectives), avec son côté science fictif mais aussi par l’effet miroir déformant de notre réalité. On verra rapidement que la présence n’est finalement pas éloignée de ce que nous vivons au quotidien, nous qui sommes en continu noyés d’informations et de publicités (toi qui me lis, essaie de te rappeler la dernière fois où tu as réussi à ne pas voir une seule publicité, même inconsciemment, pendant 24h de suite). Mais la présence, c’est également ce que l’on recherche par l’utilisation de sites sociaux, et enfin c’est également la trace que laisse nos défunts.

Dystopie douce-amère, Le grand vide nous questionne sur nos besoins réels et nos usages de notre « présence ». L’évolution que va suivre Manel Naher n’est pas sans rappeler certaines œuvres cultes où la déconstruction du héros est finalement au moins aussi plaisante à lire que sa montée au pouvoir. Après lecture, on voit clairement le texte se construire sur trois parties liées et pourtant finement indépendantes, ce qui assure un équilibre subtil à la narration et au questionnement, sans jamais perdre de vue l’histoire qui nous intéresse.
Conclusion :
Avec Le grand vide, Léa Murawiec signe un album particulièrement riche qui mérite sa médiatisation actuelle. Fable dystopique subtile, Le grand vide nous propose de réfléchir à notre place dans le monde et à notre retour aux sources. Finalement notre présence est-elle une part qui nous définit ou un masque que l’on a du mal à désolidariser de notre être ?
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